L'economie des déchets technologiques.
La gestion des déchets technologiques n’est pas seulement un défi, c’est l’une des industries les plus lucratives de l’avenir. Alors que le monde s’accélère vers une ère numérique marquée par l’Internet des objets (IoT), l’intelligence artificielle et le cloud computing, notre dépendance à la technologie explose. Chaque clic, chaque vidéo en streaming, chaque donnée envoyée produit une empreinte numérique – et ces données, comme le plastique ou le métal, deviennent une forme de déchet une fois leur utilité expirée.
C’est là qu’intervient la technologie du cloud : la "poubelle" moderne du déchet numérique. Mais contrairement à une décharge classique, cette poubelle est intelligente, en expansion constante, et offre des opportunités économiques dans les centres de données, la cybersécurité, les systèmes de refroidissement, et les énergies renouvelables qui les alimentent.
Nous sommes à l’intersection de deux révolutions – numérique et écologique. Les véhicules électriques (VE) ne sont plus un luxe ou une mode passagère : ils sont l’avenir. Les études prévoient qu’en 2035, plus de 80 % des véhicules vendus dans le monde seront électriques. Parallèlement, l’énergie solaire est en plein essor, transformant les toits en petites centrales décentralisées. Mais chaque batterie de VE et chaque panneau solaire a une durée de vie – et à la fin de ce cycle se trouve une nouvelle mine d’or : le recyclage.
Le trésor n’est pas toujours dans le produit fini, mais dans les composants nécessaires à sa fabrication – et dans les systèmes qui gèrent sa fin de vie. Nous avons besoin de ce que l’on pourrait appeler des services après-produit : recycler le lithium, réutiliser les terres rares, reconditionner les cellules photovoltaïques, entretenir les infrastructures massives de données.
Prenons l’exemple de Starlink d’Elon Musk : c’est une technologie en avance, comme le Bitcoin à ses débuts – trop lointaine pour certains, pour l’instant. Pendant que certains pays construisent leurs fusées, d’autres posent leurs câbles de fibre optique – plus lent peut-être, mais indispensable. Et lorsque Musk atteindra Mars, on ne peut qu’imaginer quelle révolution technologique suivra. Il est en avance car il comprend que le pouvoir réside autant dans le centre que dans la périphérie – posséder les outils qui permettent le futur.
Sur Terre, les énergies renouvelables transforment aussi l’agriculture. Des technologies comme l’hydroponie, l’aéroponie ou l’aquaponie redéfinissent notre manière de cultiver : moins de terre, moins d’eau, et une énergie propre. Les systèmes d’irrigation alimentés par le solaire, les capteurs agricoles guidés par l’intelligence artificielle, et les fermes verticales connectées aux réseaux intelligents dessinent une nouvelle sécurité alimentaire, surtout dans les zones climatiquement vulnérables. Imaginons l’Afrique comme centre mondial d’exportation – ou mieux, de fabrication – de ces systèmes agricoles verts.
Avec ses vastes réserves de matières premières stratégiques – cobalt, lithium, cuivre – l’Afrique est idéalement positionnée. Mais au lieu d’exporter simplement des ressources brutes, le continent peut se tourner vers la production de composants pour technologies vertes : panneaux solaires, pièces d’éoliennes, batteries, semi-conducteurs. Taïwan est devenue une puissance mondiale en misant sur les semi-conducteurs. L’Afrique peut faire de même dans les énergies renouvelables et le recyclage.
Sa capacité à traiter les déchets du monde – non pas comme une décharge, mais comme une zone de transformation – peut devenir un avantage stratégique. Si l’Afrique devient un pôle du recyclage technologique et de la valorisation des déchets, elle ne suivra pas la révolution verte – elle la dirigera.
Bien sûr, cela nécessite une réforme de la gouvernance. Le déchet n’est pas qu’un problème physique – la corruption est aussi une forme de déchet systémique. Mais même là, il y a du potentiel. Si nous pouvons détourner les dépenses publiques gaspillées vers des économies circulaires, l’Afrique pourra transformer son rapport au "gaspillage" en l’un des secteurs les plus durables et rentables du 21e siècle.
Le message pour les COP et les sommets climatiques est clair : il ne faut pas seulement réduire la pollution, mais apprendre à la recycler et à en tirer profit. La civilisation, par nature, pollue. Mais c’est la manière dont nous gérons nos déchets – numériques, physiques, politiques – qui définira notre héritage.
« Que celui qui n’utilise pas les toilettes lève la main droite. » Le déchet est universel. La vraie question est : qu’en faisons-nous ?
Marius Y. M. C. Oula
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